Santé

"Je m'adresse à tous les hommes" : Thomas Ramos, l'arrière du XV de France, s'engage dans la lutte contre l'endométriose

"Je m'adresse à tous les hommes" : Thomas Ramos, l'arrière du XV de France, s'engage dans la lutte contre l'endométriose
Le joueur du XV de France est le parrain d’EndoFrance, Association française de lutte contre l’endométriose. Photo Franck Fife/AFP
À l’occasion de la Journée contre l’endométriose, ce 28 mars, Thomas Ramos prend la parole. Pour l’arrière du XV de France et du Stade Toulousain, il est « important dans une maladie qui touche les femmes qu’une voix d’homme puisse s’exprimer ».

L'arrière Thomas Ramos, pièce maîtresse du XV de France et du Stade Toulousain, est engagé sur un tout autre terrain : l’endométriose. Cette maladie, dont souffre sa femme, Sophie, il veut lui donner « de la visibilité ». Surtout dans un milieu comme le rugby où « on ne parle pas de maladie, encore moins de maladie féminine ».

Votre engagement pour faire connaître et mieux comprendre l’endométriose, c’est avant tout une histoire personnelle. C’est ce qui vous a poussé à témoigner ? Ma femme est atteinte d’endométriose depuis quelques années. Au bout d’une petite réflexion avec elle, j’ai décidé de contacter l’association EndoFrance pour voir ce qu’il était possible de faire en tant qu’homme et conjoint d’une personne souffrant de cette maladie. Avec la modeste visibilité qui est la mienne, j’ai accepté d’en être le parrain.

Informer sur cette maladie mal connue, c’est aussi pouvoir la dépister le plus tôt possible. Le diagnostic est en moyenne de sept ans. Comment cela s’est-il passé pour votre épouse ? En fait, depuis toujours, elle souffrait de règles douloureuses. Mais comme souvent, on passe à côté de cette maladie parce qu’on pense que c’est normal pour une jeune fille ou une femme d’avoir mal tous les mois. À partir du moment où ces douleurs l’ont empêché de vivre au quotidien, on s’est posé la question. La réponse n’a pas mis sept ans : elle s’est auto-diagnostiquée grâce à des recherches sur internet, grâce à des forums et aussi parce qu’elle est dans le milieu paramédical, ce qui aide. Elle sentait au fond d’elle qu’elle avait quelque chose qui n’allait pas et elle voulait savoir ce que c’était. Les rendez-vous chez les gastro-entérologues ne donnaient rien. Au fur et à mesure, elle a pris les choses en main.

Comment la maladie se manifestait-elle ? D’énormes douleurs au ventre, des règles douloureuses, des ballonnements, des douleurs pendant les rapports. Les maux qu’elle décrit lors de ses crises, c’est comme des coups de couteau dans le ventre. Il y a aussi les souffrances psychologiques. Ne serait-ce que d’avoir la force de se lever lorsqu’elle est pliée en deux. Après, il y a aussi les traitements, et les effets secondaires qui entrent en jeu. Plein de choses qui font que c’est dur à vivre pour ces femmes.

Une fois que les mots ont été mis sur les maux, vous avez senti, chez elle, une forme de soulagement ? C’est le paradoxe. D’un côté, on venait d’apprendre qu’elle était atteinte d’endométriose, et d’un autre côté, elle était libérée d’un poids, celui de ne pas savoir.

Aujourd’hui, les traitements ont-ils eu un effet ou cela reste-t-il toujours aussi difficile ? Non, ça reste compliqué comme pour beaucoup de femmes. Même après ses chirurgies – elle a eu trois opérations et elle en attend une quatrième. C’est une maladie sans fin. L’opération, parfois, ne suffit pas à stopper la maladie et elle revient.

C’est une maladie qui peut mettre en péril le couple. Est-ce pour cela que vous vous adressez aux hommes en particulier ? Au-delà du conjoint, ce sont à tous les hommes que je m’adresse. Même si on ne comprend pas toujours ce qui se passe, il faut être une épaule pour nos femmes, nos sœurs, nos amies. Il est important pour elles de se sentir écoutées, d’être entendues aussi dans les douleurs qu’elles décrivent.

Vous sensibilisez aussi sur le coût des soins, peu remboursés par la Sécurité sociale. Quelles sont les solutions pour s'en sortir ? Pour soulager, apaiser la douleur au quotidien, il faudrait une à deux séances d’ostéopathie par mois, par exemple, là où les mutuelles en remboursent trois ou quatre par an. Certains traitements ne sont pas remboursés du tout. Renoncer à se soigner par manque de moyens, c’est la double peine.

C’est pourtant un enjeu de santé publique sachant qu’on estime qu’une femme sur dix en âge de procréer souffre d’endométriose. Et c’est sans doute sous-estimé. On peut penser que beaucoup de femmes souffrent encore en silence sans jamais avoir été diagnostiquées. Ne serait-ce qu’en France, deux millions de femmes sont concernées. Cela touche donc un grand nombre de personnes et de familles dans la société. 

Cette maladie peut s’avérer très handicapante sur le plan professionnel. Or, bien peu d’entreprises prennent cet élément en considération. Pour ces femmes, il y a des jours où elles ne peuvent pas se lever du lit ou du canapé. C’est très compliqué pour aller travailler. Il peut y avoir des arrêts maladie qui se cumulent, qui se prolongent. Une opération, c’est quand même assez lourd?; on peut mettre entre quinze jours et un mois et demi à s’en remettre. Donc, si on n’a pas un employeur compréhensif et qui essaie de se mettre à leur place, ça peut engendrer des tensions.

Au sein de l’association EndoFrance, quel est votre rôle ? Parrain, c’est un mot qui me va très bien. Il est important dans une maladie qui touche les femmes qu’une voix d’homme puisse s’exprimer, en connaissance de cause. Mon rôle, c’est d’inviter les hommes à être le plus présent possible dans l’accompagnement de leur femme, de leur sœur. Il y a encore beaucoup de progrès à accomplir.

Votre voix tranche d’autant plus que vous évoluez dans un milieu viril ? Dans le milieu du rugby, il faut éviter de montrer ses émotions. Mais pouvoir prendre la parole sur des sujets comme l’endométriose, c’est intéressant. On se rend compte qu’on arrive à être écouté.

Vous avez même réussi à organiser une manifestation au sein du Stade Toulousain. Le club a répondu favorablement. Cela a permis à l’association d’installer un stand deux heures avant le match de Coupe d’Europe contre Gloucester et de se donner de la visibilité. Le public qui est venu était majoritairement des hommes. C’était marquant pour les bénévoles, qui sont toutes des femmes. Ce qui prouve, au passage, tous les efforts que l’on doit encore produire pour sortir du silence cette maladie.

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Une maladie gynécologique inflammatoire

Qu’est-ce que c’est ? L’endométriose est une maladie gynécologique inflammatoire chronique qui touche 1 femme sur 10 en âge de procréer. Elle se définit par la présence, hors de la cavité utérine, de tissu semblable  à celui de la muqueuse de l’utérus, appelée endomètre. Elle peut provoquer des douleurs intenses, qui engendrent de la fatigue,  des symptômes de dépression ou d’anxiété. Elle est aussi la première cause d’infertilité  en France, présente dans un tiers des cas. 

Comment dépister l’endométriose ? Chaque cas d’endométriose est unique et c’est en accord avec son médecin que les décisions doivent se prendre. Le diagnostic se fait par échographie, voire par IRM.

Quels sont les traitements ? Il n’existe pas aujourd’hui de traitements définitifs de l’endométriose, même si l’hormonothérapie et/ou la chirurgie peuvent endiguer l’évolution de cette maladie durant plusieurs années selon les cas. La Haute autorité de santé  et le Collège national des gynécologues et obstétriciens français recommandent parmi les thérapies, complémentaires aux traitements médicamenteux, l’ostéopathie,  la kinésithérapie, la relaxation (auto-hypnose, sophrologie), l’activité physique adaptée comme le yoga. 

Propos recueillis par Nathalie Van Praagh


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2 commentaires

Rugby03 a posté le 28 mars 2024 à 15h18

Un super garçon qui mérite le respect pour son engagement qui touche à sa vie privée.

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Céline a posté le 28 mars 2024 à 13h40

J'appréciais déjà beaucoup Thomas Ramos en tant que joueur mais là plu encore !

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