Cyclisme

Géminiani : "Alaphilippe ? Mon favori au puy Mary"

Géminiani : "Alaphilippe ? Mon favori au puy Mary"
Raphaël Géminiani voit Julian Alaphilippe s'imposer au puy Mary, ce vendredi. © Francis CAMPAGNONI
Comme tous les jours, Raphaël Géminiani sera devant sa télévision, ce vendredi, pour suivre l’étape Châtel-Guyon - puy Mary. En portant un regard attentif sur les trois Auvergnats, notamment Julian Alaphilippe qu’il voit s’imposer au sommet du Pas de Peyrol.

La voix est toujours aussi enjouée au bout du fil. Le verbe est invariablement bien choisi et le regard du passionné de cyclisme reste intact. À plus de 95 ans, Raphaël Géminiani est toujours aussi prompt à parler vélo. Surtout lorsque le Tour de France, qu’il continue de suivre quotidiennement, revient chez lui, à Clermont-Ferrand, où il s’était imposé en 1951. L’occasion d’ouvrir avec lui la boîte à souvenirs mais aussi de parler du présent.

 

Trente-deux ans après, le Tour de France fait son retour à Clermont. Qu’est-ce que cela vous fait ?

« C’est bien. Mais c’est dommage que ce ne soit qu’un départ. Une arrivée, ça a quand même plus de gueule, ça amène du monde. Là, les coureurs vont arriver au dernier moment et les spectateurs vont juste les apercevoir. Qui plus est avec le contexte sanitaire actuel. Enfin, il vaut mieux ça que rien. »

 

Le message de Géminiani qui a ému Alaphilippe

 

L'Auvergnat que vous êtes doit être heureux de voir le Massif Central apparaître régulièrement sur la carte du Tour depuis plusieurs années ?

« Le Massif Central offre un relief qui s’adapte mieux aux coureurs actuels, qui ne sont pas de grands grimpeurs. C’est de la moyenne montagne. Dans l’étape du puy Mary, on va voir des coureurs qu’on ne voit pas dans la haute montagne. Ça va permettre de débrider la course. Si on ne met que de la haute montagne, on ne retrouvera que sept-huit coureurs. Si tu mets de la moyenne montagne, tu intéresseras une cinquantaine de coureurs. On verra donc toujours un meilleur spectacle. »

Raphaël Géminiani compare Julian Alaphilippe à Bernard Hinault.
 

Le Tour de France à Clermont, ça vous rappelle des souvenirs ?

« Je ne suis arrivé qu’une seule fois à Clermont en tant que coureur, en 1951… et j’ai gagné. Cette étape, je l’avais dans la tête. Il y avait beau y avoir Bartali, Coppi, Koblet. Il aurait même pu y avoir le Pape, il aurait fait deuxième (rire). J’avais un moral. Si d’autres étapes étaient arrivées à Clermont, j’en aurais gagné d’autres. Tu as une force supplémentaire quand tu cours chez toi, tu as tes supporters, tes amis, ta famille… »

 

Racontez-nous cette victoire de 1951...

« Le matin de l’étape, Bobet, avec lequel on se tirait la bourre, avait passé le tambour auprès des Koblet, Coppi, Bartali… : ‘’Attention, Gem’ va attaquer aujourd’hui’’. Dans la côte de Pontaumur, effectivement, j’ai mis un grand coup de flingue là-dedans. J’ai pris une minute environ. Mais ils m’ont rejoint. Bobet m’a dit : ‘’je t’avais bien dit que tu ne réussirais pas’’. Sauf qu’il oubliait une chose, c’est qu’on arrivait par les quatre routes de Nébouzat et qu’on attaquait la Moreno avec un virage à gauche. Je me suis rapproché de la tête du groupe et j’ai flingué dans la Moreno. Je l’ai montée… personne ne pouvait me rejoindre. Je me suis arraché les tripes. Je suis passé en tête au sommet. J’ai chuté derrière le puy de Dôme, j’ai dérapé. Mais je suis rapidement remonté sur le vélo. Je n’ai pas fait comme les joueurs de football à me traîner par terre. Le vélo n’avait rien, moi je saignais un peu du coude mais je n’en avais rien à faire. J’ai monté le col de Goules à fond, j’ai descendu la Baraque à bloc. Et puis, je suis arrivé au vélodrome. J’étais imbattable. »

 

« Le Tour a pris un coup de chevrotine quand même »

 

Que gardez-vous de cette arrivée victorieuse sur le vélodrome du stade Marcombes ?

« Tu es tout seul en plein effort et d’un seul coup tu déboules dans un lieu où tout le monde se lève et se met à crier. Alors forcément, la surprise est grande, la transition est brutale. Cela prouve une chose et on s’en rend compte aujourd’hui : le sport sans spectateur, c’est affreux. Je ne voudrais pas courir en ce moment. Car le supporter te donne le moral, la force. Tu es obligé de te surpasser pour ne pas le décevoir. »

Raphaël Géminiani s'était imposé à Clermont lors de la première arrivée du Tour de France dans la capitale auvergnate, en 1951.
 

Justement, quel regard portez-vous sur ce Tour 2020 si particulier ?

« Le Tour a pris un coup de chevrotine quand même. C’est maigre au niveau du public. Et le public, c’est ce qui fait le succès du Tour. Alors certains disent : ‘’mais les coureurs n’attaquent pas’’. Ils ne roulent pas parce qu’ils sont moins portés par les gens. »

 

« Un parcours pour Alaphilippe »

 

Selon vous, qui va remporter ce Tour de France ?

« Bernal court intelligemment, il ne fait pas beaucoup d’efforts, il est bon en montagne, en contre-la-montre. C’est un coureur régulier. Mais il va devoir se méfier de Roglic. À partir de maintenant, toutes les étapes vont compter. Et notamment celle entre Châtel-Guyon et le Puy Mary... C’est un parcours pour Alaphilippe ça. »

 

C’est votre favori pour cette étape ?

« Ah oui. Il connaît le parcours, qui lui convient?: c’est de la moyenne montagne. Et puis, il va rouler dans le Puy-de-Dôme et le Cantal, des départements qui l’ont vu débuter. »

  

Son regard sur les trois Auvergnats engagés sur ce Tour de France :

Julian Alaphilippe. 
« Il a fait une croix sur le général, mais il n’a pas tiré toutes ses cartouches. Il me fait penser à Hinault. Il a des démarrages fulgurants, il a une puissance de train, il est intelligent en course… C’est Hinault. »

Romain Bardet. « Je crois qu’il a laissé passer ses occasions. Il a eu des bons résultats, avec ses deux podiums sur le Tour de France (en 2016 et 2017) mais il courait à la ‘’Poulidor’’, dans la roue de Froome et de l’équipe Sky comme faisait Poulidor avec Anquetil. Il n’a pas eu d’initiatives et un coureur qui ne prend pas d’initiatives ne peut pas être dangereux. » 

Rémi Cavagna. « Il est prometteur. Il m’a l’air de suivre le chemin d’Alaphilippe. Là, il va arriver à un moment important de sa carrière : va-t-il poursuivre dans cette voie en restant sérieux ? Ou bien va-t-il s’imaginer que tout est déjà arrivé ? C’est à lui de jouer. Il y a un bon début, à lui d’assurer le reste. » 

Manuel Caillaud


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