Athlétisme

A 44 ans, la discobole Mélina Robert-Michon vise la médaille à Paris pour ses septièmes Jeux olympiques


Mélina Robert-Michon se prépare pour ses 7e Jeux Olympiques
Médaillée d’argent aux Jeux Olympiques de Rio, en 2016, Mélina Robert-Michon vise une médaille à Paris. À 44 ans, la lanceuse de disque pourrait atteindre un autre rêve pour sa septième olympiade : porter le drapeau de la France lors de la cérémonie d’ouverture sur la Seine, le 26 juillet.

Vendredi 22 mars. 9?h?15. Parc de Parilly, à Vénissieux, près de Lyon. Mélina Robert-Michon attaque une nouvelle journée d’entraînement. La dernière ouverte aux médias. En ce matin printanier, elle est allée chercher les viennoiseries à la boulangerie de son quartier et fait le café pour tout le monde. Il y a là l’ensemble de la presse régionale, « très fidèle » et qui « lui ressemble », souligne son agent, Caroline Angelini. « C’est une fille qui a des valeurs, une terrienne. »

Depuis septembre, la spécialiste du disque, en lice pour sa septième olympiade – record détenu jusque-là par la cycliste Jeannie Longo –, a répondu à « toutes les demandes », petites ou grandes, sans distinction.

Maintenant que l’athlète de 44 ans, maman de deux filles, fait figure de favorite pour porter le drapeau de l’équipe de France, à Paris, « ça vient de partout, en masse », confie Caroline. « On est sollicité par la presse féminine, la presse sportive, mais aussi la presse généraliste, même Le Monde. Elle a enfin la visibilité qu’elle mérite et son sport aussi. »

Sous les feux des projecteurs. Photo Richard Brunel

En tête dans les sondages

Dans L’Équipe du jour où elle figure à la Une, la médaillée d’argent aux JO de Rio écrase la concurrence. Les lecteurs du quotidien sportif, appelés à voter pour les deux porte-drapeaux (un homme et une femme), l’ont plébiscitée. À quatre mois de la cérémonie d’ouverture sur la Seine, Mélina Robert-Michon, créditée de 44 %, creuse l’écart sur la footballeuse Wendy Renard (15 %) et la judokate Romane Dicko (11 %).

Pas de quoi affoler l’intéressée. « Forcément j’y pense parce qu’on m’en parle de plus en plus. Ce serait une immense fierté. Mais il faut que je m’entraîne, que je fasse ma prépa. Le but, c’est d’être performante le jour J. Il faut travailler tous les jours. »

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Pour 60 cm...

Devant son public, cette compétitrice née veut effacer la désillusion de Tokyo, il y a trois ans, où la finale lui avait échappé pour 60 cm. Elle sait que lancer à la maison va amener une pression supplémentaire. « Si psychologiquement, tu n’arrives pas à gérer tout ce stress, ta technique et ton physique, même au top, ne te servent à rien. Je travaille avec une psychologue du sport depuis 2015, ça fait partie prenante de l’entraînement. Il faut arriver à se servir de cette émotion et de cette dynamique que seront les Jeux à Paris pour se sublimer. »

Lancer à la maison, une pression supplémentaire. Photo Richard Brunel

Le 10 mars, l’Iséroise, licenciée à Lyon Athlétisme, a pris la 3e place de l’épreuve de disque de la Coupe d’Europe de lancers, à Leiria (Portugal). Sur sa dernière tentative, elle a réussi un jet à 62,46 m. Ce jour-là, elle a égalé les 69 capes en équipe de France d’athlétisme de Léone Bertimon, lanceuse de poids internationale entre 1972 et 1995.

Son meilleur concours de l’hiver après les 61,02 m de son titre aux « France », le 25 février, à Salon-de-Provence, où elle a engrangé sa 39e couronne nationale.

« Je ne suis pas Serge »

« De cette coupe d’Europe, on peut retenir la bonne place. Elle a su se battre. Sur le plan de la performance, on pouvait espérer un peu mieux. Disons que nous sommes sur une bonne base de travail sachant que Mélina se construit toujours dans la saison », commente sobrement Loïc Fournet, son entraîneur. À la sortie de Tokyo, le compagnon de Mélina, lui-même discobole, a pris la suite de Serge Debié, le coach historique parti à la retraite mais qui continue à épauler la championne dans sa quête d’une nouvelle médaille olympique.
« Je ne suis pas Serge, on ne remplace pas un entraîneur avec qui on a travaillé pendant vingt-quatre ans. » Vingt-quatre ans, c’est aussi le nombre d’années de vie commune pour le couple désormais uni à la ville comme au stade. « Il a fallu recréer un vocabulaire, apprendre à nous connaître, sportivement parlant », sourit Loïc.

Lancer de fers à repasser 

L’entraînement ce jour-là, après trois quarts d’heure d’échauffement et d’étirements, vise à « faire du disque sans faire de disque », soit une heure dans le cercle de 2,50 m de diamètre en variant les exercices pour ménager le corps.

« La basse intensité répétée » dont parle Loïc Fournet consiste à projeter à tour de bras des vieux fers à repasser sans élan, puis avec élan. Avant de chercher l’amplitude, « le plus grand chemin possible », à l’aide d’un médecine-ball puis d’un disque en mimant le geste, sans lancer. Un geste dont on perçoit, de près, toute la complexité technique et toute la beauté, mélange d’élégance et de puissance.

« Plus de 25 ans de sport de haut niveau, ce sont des tonnes de jets, une grosse quantité de travail. Il faut veiller à ce que le corps puisse supporter les contraintes de l’entraînement et des compétitions, mais aussi la fatigue humaine, de la femme et de la vie familiale »

Loïc Fournet (Entraîneur et compagnon de Mélina Robert-Michon)

« Exigeante, tenace, perfectionniste »

À part une blessure au dos, en 2005, qui l’a éloigné quelques mois, Mélina Robert-Michon n’a connu aucun pépin physique. « Elle a conservé toute sa capacité athlétique. Sa puissance et son potentiel sont intacts. Elle est d’une constance remarquable », relève Jérôme Simian son préparateur physique, qui la suit depuis vingt-six ans.
« Mélina est exigeante, tenace, perfectionniste », énumère Loïc Fournet. « Pénible, il n’ose pas le dire?! », interrompt-elle dans un rire. « Elle optimise au maximum ses qualités physiques, reprend-il. C’est une compétitrice, elle a besoin d’opposition, de challenge. C’est le championnat qui l’attire. »

Cet entourage, le même depuis les débuts, l’athlète, vice-championne du monde en 2013 et vice-championne d’Europe en 2014, lui doit, dit-elle, le secret de sa longévité. « J’ai la chance d’avoir autour de moi des gens qui ont été capables de m’amener au plus haut niveau et, surtout, de me faire durer. Le plus difficile, c’est de répéter les performances. »Paris 2024 : objectif une médaille. Photo Richard Brunel

« L'appétit vient en mangeant »

Beaucoup d’athlètes auraient pu considérer l’argent olympique, glané en 2016, comme une consécration. Pas elle. Enfin presque. « J’ai cru, à un moment donné, que ça allait me suffire. Mais, finalement, l’appétit vient en mangeant et je me suis dit : “C’est top, ce truc.” C’est un peu mon tempérament de vouloir toujours plus. Je sens que je ne suis pas arrivée au bout. Je peux encore m’améliorer et je ne peux pas m’arrêter tant que je n’aurai pas la sensation d’avoir tout fait. »

Son objectif est connu pour Paris : une médaille, la médaille d’or. Pour atteindre le Graal, il ne lui faudra pas seulement battre mais pulvériser son record de France à 66,73 m.

 

« Avant Rio, j’avais annoncé la couleur : record de France en finale olympique. Je sais que si je veux une nouvelle médaille, il faudra aller plus loin, beaucoup plus loin. La gagne, c’est ce qui me motive. C’est pour ça que je travaille tous les jours. »

L'avantage de l'expérience

Outre la cérémonie d’ouverture, Mélina Robert-Michon a coché deux dates sur le calendrier : le 2 août, jour des « qualifs », et le 5 août, jour de la finale, les deux en soirée. De quoi pouvoir lancer à la fraîche?? Rien de moins sûr car la canicule pourrait jouer les trouble-fêtes. Mais il peut pleuvoir aussi, ce qui rebattrait les cartes dans une aire de lancer détrempée.

Face aux imprévus, l'expérience peut avantager. « C’est ce qui s’est passé à Rio avec les qualifications le soir et la finale dès le lendemain matin. Les autres ont été plus perturbées que moi. Ma fille m’a bien préparé car elle ne dormait pas toujours bien la nuit. À 7 h du matin, j’étais en pleine forme, prête pour la finale. » On connaît la suite.

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« Ça complique la vie de famille»

La famille et le sport sont inséparables dans la vie de la médaillée olympique. Encore plus depuis que son compagnon est aussi son entraîneur.

Dans la maternité, elle est maman de deux filles de 13 ans et 5 ans, Mélina Robert-Michon a trouvé une motivation supplémentaire pour se surpasser. « Mon objectif après mes grossesses, ce n’était pas de revenir à mon niveau. C’était de progresser, d’être meilleure. Mais pour cela, il faut que l’entraîneur soit raccord, que l’entourage assure. Car ce n’est pas facile, c’est même souvent dur. Je ne voulais pas vendre du rêve non plus. »Depuis les JO de Tokyo, Loïc Fournet, le compagnon de Mélina, est aussi son entraîneur. Photo Richard Brunel

D’ailleurs, quand on lui demande si l’organisation du quotidien est facilitée depuis que son compagnon est devenu son entraîneur, la réponse est claire : « Non, ça complique la vie de famille. Avant, quand je partais, c’est Loïc qui gérait. Maintenant, on part beaucoup tous les deux. Mais j’ai la chance d’avoir ma famille, mes amis qui m’aident pour être bien. Et pour être bien dans mon sport, j’ai besoin de savoir que nos enfants s’éclatent quand on n’est pas là. »

Pour Loïc Fournet, l’agenda est d’autant plus fourni qu’il continue à exercer son métier d’ostéopathe. « La seule condition à cette décision commune était que cela ne dégrade pas notre vie privée. Avec l’aide de Meriem Salmi (la psychologue des champions, dont Teddy Riner, ndlr), on a travaillé pour se comprendre, s’écouter, se dire les choses. Et cela nous a permis d’améliorer aussi notre communication sur un plan personnel. »
« On marche ensemble. On partage tout. » Un couple en béton??  « Le ciment a été mis depuis un moment. »

Nathalie Van Praagh


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1 commentaire

PTL a posté le 27 mars 2024 à 12h31

Mélina... Porte drapeau !

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